Le phénomène du "Kahl" ou "dinosaure" : un frein réel au progrès en Algérie ?

Le terme Kahl (vieux) ou dinosaure est devenu une tendance sur les réseaux sociaux, mais derrière l’humour se cache un vrai blocage qui freine l’innovation et la modernisation en Algérie.
07-08-2025
Mise à jour le : 09 Aou 2025 11:47
Introduction
Sur les réseaux sociaux algériens, on entend souvent le terme “Kahl” (ou parfois “dinosaure”) pour désigner une personne perçue comme déconnectée, réfractaire au changement ou hostile aux nouvelles idées.
Au départ, c’est une expression humoristique, mais derrière la blague se cache un vrai problème : dans beaucoup d’entreprises et d’organisations, cette mentalité peut freiner l’innovation, bloquer la modernisation et faire fuir les talents.
Et contrairement à ce que certains pensent, ce n’est pas une question d’âge. C’est avant tout une question d’état d’esprit.
Qui est vraiment le “Kahl” ?
Le “kahl” n’est pas forcément :
- Le plus âgé dans la pièce.
- Le dirigeant ou le manager.
- Un ancien qui ne comprend pas TikTok.
Non.
Le “kahl” peut être n’importe qui. C’est avant tout une mentalité qui consiste à dire “On a toujours fait comme ça, pourquoi changer ?”.
Exemples :
- Un employé (jeune ou vieux) qui bloque un projet de digitalisation pour protéger ses habitudes ou ses avantages.
- Un membre du grand public qui refuse d’utiliser un service en ligne, par peur ou par méfiance.
- Un parent qui répète à son enfant : “L’ordinateur, c’est une perte de temps” — comme dans mon expérience personnelle, quand mon père (Allah yerhmou) me disait exactement ça.
- Un enseignant qui interdit les outils numériques dans ses cours, par crainte de “perdre le contrôle”.
Pourquoi ce phénomène existe ?
Les causes sont multiples et souvent sociales avant d’être techniques :
- Méfiance générationnelle
Les jeunes maîtrisent les technologies, mais le pouvoir décisionnel est souvent entre les mains de ceux qui n’en ont pas l’usage ou qui en ont peur. - Communication coupée entre générations
Le transfert de savoir ne se fait pas bien. Les anciens pensent que les jeunes ne les écoutent pas, et les jeunes pensent que les anciens sont “hors sujet”. - Digitalisation mal intégrée
En Algérie, la transition numérique n’a pas été progressive. Une partie de la population est restée déconnectée pendant que l’autre adoptait massivement les nouvelles technologies. - Peur de perdre sa place
L’innovation peut être perçue comme une menace directe pour certains statuts. - Manque de reconnaissance mutuelle
Les jeunes ne valorisent pas toujours l’expérience, et les anciens ne valorisent pas toujours la maîtrise technique.
Conséquences concrètes
Le “kahlisme” n’est pas juste agaçant, il a un impact direct :
- Blocage de l’innovation : les projets restent sur papier.
- Fuite des talents : les jeunes motivés partent ailleurs.
- Retard technologique : on reste spectateurs pendant que le monde avance.
- Décisions basées sur l’habitude : au lieu d’être basées sur des données ou des opportunités.
Comment sortir du piège ?
Il ne s’agit pas de “gagner” une guerre des générations, mais de créer un pont entre elles.
Pistes d’action :
- Donner de la place aux jeunes dans la prise de décision
Même à petite échelle, impliquer les nouvelles générations crée de la responsabilité et de la motivation. - Responsabiliser les jeunes
Les “kahls” justifient souvent leur résistance par le manque d’expérience des jeunes. À ces derniers de prouver leur sérieux, tout en restant à l’écoute de ceux qui ont déjà traversé plusieurs crises. - Former et sensibiliser les “kahls”
Leur faire découvrir la technologie par des canaux de confiance (et pas uniquement par les réseaux sociaux), en expliquant les opportunités réelles qu’elle offre. - Créer un échange équilibré
La technique seule ne suffit pas. Les jeunes doivent comprendre que l’expérience humaine, la patience et la vision long terme sont aussi essentielles que l’innovation.
Conclusion
Le phénomène du “kahl” est en réalité le symptôme d’une société en mutation.
La tension entre générations prouve qu’il y a du mouvement, mais si la fracture devient trop profonde, elle peut ralentir tout le pays.
Le “kahl” n’est pas condamné à rester un frein : il peut devenir un atout s’il accepte de s’adapter.
Le jeune, lui, doit comprendre que la technologie n’est qu’un outil, et que l’ouverture d’esprit passe aussi par l’écoute et la compréhension des expériences passées.
“Avant de juger, il faut comprendre.”